3 Mécanisme d'action des antidépresseurs
Le mécanisme d�action des antidépresseurs est largement centré sur l�impact synaptique de ces médicaments. Beaucoup d�arguments plaident en faveur d�une neurobiologie propre de la dépression, fondée sur les systèmes monoaminergiques. Lors d�épisodes dépressifs, la neurotransmission aminergique (essentiellement noradrénergique et sérotoninergique) est diminuée, offrant ainsi aux thérapeutes une corrélation anatomo-clinique de la dépression pouvant s�expliquer par la down regulation des récepteurs béta-adrénergiques, la diminution d�AMPc. Cependant d�autres grands systèmes de neurotransmission sont impliqués de façon plus ou moins partielles dans la dépression, citons le système cholinergique, le système GABA-ergique, le système dopaminergique, les récepteurs N-méthyl-D-aspartate (NMDA). La biologie de la dépression n�est pas simple et tous les mécanismes d�action des antidépresseurs ne sont pas encore élucidés.
3.1 Les voies aminergiques
La NA et la DA sont synthétisées en présynaptique à partir de la phénylalanine et de la tyrosine ; l�enzyme clef de la régulation de cette synthèse est la tyrosine-hydroxylase. La 5HT est synthétisée à partir du tryptophane. Ces amines sont ensuite acheminées vers l�extrémité axonale ou elles sont stockées dans des vésicules. Elles sont libérées sous l�effet de l�influx nerveux (exocytose calcium-dépendante) dans l�espace synaptique. Des mécanismes d�élimination surviennent immédiatement après cette libération : la recapture et le catabolisme enzymatique.
La recapture des neurotransmetteurs se fait par transport actif sodium dépendant. C�est à ce niveau qu�interviennent les antidépresseurs tricycliques ; en empêchant cette recapture, ils facilitent la transmission monoaminergique. Cette inhibition de la recapture se fait sur toutes les mono-amines pour certains antidépresseurs (les TCA), sur une seule pour d�autres (inhibiteurs sélectifs de la recapture de la 5HT).
La dégradation des mono-amines fait intervenir deux types d�enzymes : la mono-amine oxydase (MAO) et la catéchol-O-méthyltransférase (COMT). C�est à ce niveau qu�agissent les inhibiteurs de la MAO (IMAO), ralentissant la dégradation des neurotransmetteurs.
En post-synaptique, l�action antidépressive des tricycliques et des IMAO peut s�expliquer par la down regulation (diminution du nombre mais non de la sensibilité) des récepteurs bêta-adrénergiques et des récepteurs sérotoninergiques 5 HT2 et par la désensibilisation de l�adénylate cyclase à la stimulation par NA. Les phénomènes de transduction du signal cellulaire via les protéines G couplées aux récepteurs, pourraient représenter un lieu d�action essentiel des antidépresseurs. Notons que c�est le site d�action supposé du lithium.
3.2 L'axe hypothalamo-hypophysaire
Il a été montré qu�un traitement au long cours par imipramine chez le rat entraînait une augmentation cérébrale de l�immuno-réactivité des récepteurs aux gluco-corticoides, particulièrement dans les régions riche en NA et en 5HT. Le lien entre la régulation de la neurotransmission aminergique centrale et la sécrétion de gluco-corticoides a été établi, renforcé par le fait que des inhibiteurs puissants de la synthèse du cortisol comme la métapyrone ou le kétoconazole (agent antifongique) possédaient des propriétés antidépressives. Le rôle du corticotrophin-releasing factor (CRF) n�est pas clairement établi mais son implication dans la réponse physiologique au stress est un argument supplémentaire (la dépression serait secondaire à une réponse désadaptée à un stress aigu). C�est cet axe qui est testé par l�épreuve de freination à la dexaméthasone.
3.3 Les nouvelles théories
Les interactions entre la régulation des amines biogènes et certains neuropeptides, les interleukines (notamment la 2 et la 6), les prostaglandines (notamment la PGE2 ) ont été mise en évidence expérimentalement sur la base d�un traitement au long cours par antidépresseurs entraîne une diminution des taux cérébraux d�interleukines et de prostaglandines. L�hypothèse que les antidépresseurs puissent normaliser la neurotransmission centrale en réduisant les taux de PGE2 et d�interleukine est avancée.
3.4 Les modèles de la pharmacologie expérimentale
Les modèles animaux sensibles aux antidépresseurs se divisent en tests de comportement et en tests d�antagonisme d�effets de certaines substances injectées aux rongeurs (par exemple la réserpine induit chez le rat une hypothermie, un ptôsis, une akinésie qui sont antagonisés par certains antidépresseurs). Les tests comportementaux les plus utilisés dans le cadre de l�étude des antidépresseurs sont les tests de Porsolt (effet des antidépresseurs sur l�immobilité dans l�eau induite par la nage forcée) et les tests de renoncement appris (modèle de Learned Helplessness).
[
http://www.med.univ-rennes1.fr/etud/pharmaco/antidepresseurs.htm#III ]